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L'actualisation des revenusFévrier 2002

L’ACTUALISATION DES REVENUS :

EXEMPLE D’UNE ÉRABLIÈRE

 

 

Dans notre article sur les méthodes d’évaluation paru en juin dernier, nous faisions état d’une valeur économique d’érablière inférieure à la valeur d’échange sur le marché en étudiant les revenus nets à la lumière d’un rendement de 5 %. À première vue, ce rendement est plutôt limité. S’agit-il donc d’un bon placement?

 

 

De quel  taux de rendement parle-t-on?

 

L’expression « taux de rendement » porte souvent à confusion puisqu’elle comporte plusieurs applications. Définissons la donc.

 

Dans l’évaluation d’un immeuble à revenu, nous avons établi que la valeur est égale aux revenus nets annuels divisés par ce que nous avons identifié comme étant un taux de rendement  ( V= RN / T ). En fait, ce taux de rendement devrait s’appeler un taux global d’actualisation (TGA). Ce taux devrait normalement être déduit du marché en comparant les prix de vente d’érablières semblables ainsi que leurs revenus nets respectifs. On peut définir ce taux comme étant «la rétribution, par le marché, du risque financier encouru par ce genre d’exploitation».

 

Il faut également faire une distinction au sujet du type de revenus nets. Il peut s’agir de revenus nets après enlèvement des frais d’exploitation ou encore de revenus nets après frais d’exploitation, intérêts sur les emprunts et amortissement, soit le bénéfice imposable[1]. Dans les exemples qui suivent, nous illustrons ces distinctions.

 

 

Le cas d’un placement garanti

 

Les certificats de placement garantis, communément appelés les CPG, oscillaient à la fin de mai 2001 autour de 5 %. Ce 5 % représente l’intérêt que l’on recevra sur un éventuel placement, soit le rendement sur le capital. Dans les publicités des institutions financières, il est présenté sous sa forme nominale. Le lecteur doit savoir qu’il s’agit d’un taux à capitalisation semestrielle, tout comme une hypothèque. Le taux annuel effectif (réel) s’établit alors à 5,0625 %. À l’anniversaire du placement, l’investisseur recevra donc le capital investit en plus de l’intérêt cumulé. Si le placement est de 100 000,00 $ sur une période de 5 ans, par exemple, les intérêts courus (rendement sur son capital) seront de 28 008,45 $.

 

 

Le cas d’un placement dans une exploitation acéricole

 

Considérations théoriques

Contrairement aux CPG, l’investissement dans une exploitation acéricole n’est pas un placement garanti. Ce placement est risqué et l’investisseur n’a aucune garantie de résultat. Un tel placement doit donc être évalué en considérant une prime de rendement.

 

Un exemple

Dans notre précédente parution, nous avions établi la valeur économique d’une érablière de 10 000 entailles à 250 000 $ en utilisant la méthode du revenu et un taux d’actualisation de 5 % pour des revenus nets après amortissement et intérêts (bénéfices imposables) sur la dette de 12 500 $ (A). Ajoutons les considérations financières suivantes :

 

Mise de fonds (40 %) :                                   100 000 $

Dette ou emprunt bancaire (60 %) :                150 000 $

Taux d’intérêt hypothécaire :                           7,75 % à capitalisation semestrielle

Période de remboursement de la dette :          10 ans

Amortissement annuel (B) :                            12 000 $

Frais annuels d’intérêt (C) :                            4 324,35 $

 

De ce simple énoncé du problème, nous pouvons déjà tirer une conclusion intéressante concernant le retour sur l’investissement du promoteur.

 

L’effet de levier

Nous remarquons que le revenu annuel moyen est estimé à 12 500 $. Sur une période de 5 ans, l’investisseur recevra, avant impôt, un montant de 62 500 $ (5 x 12 500 $) après avoir payé toutes les dépenses d’exploitation et d’intérêt et soustrait l’amortissement (reste à payer le capital). Le rendement sur la mise de fonds est donc supérieur à celui du CPG que nous avons établi à 28 008,45 $. Cet accroissement du rendement se nomme l’effet de levier, communément appelé faire de l’argent avec l’argent des autres. C’est l’investissement de l’argent emprunté (150 000 $) à un taux de rendement supérieur à son coût en intérêt qui explique cette différence de revenus.

 

Quel est donc le TGA?

Pour calculer ce taux d’actualisation, nous devons ajouter aux revenus nets ci-haut, qui sont en fait des bénéfices imposables, les frais d’intérêt et d’amortissement dans le but d’obtenir les revenus nets après dépenses d’exploitation. Ces revenus nets après frais d’exploitation deviennent donc de 28 824,35 $ (A + B + C). Si nous divisons ces revenus par la valeur, que nous avions établie à 250 000 $, nous obtenons un TGA de 11,53 %, ce qui est effectivement supérieur au 5 % nominal des CPG et au taux hypothécaire (7,75 %).

  

Le rendement sur la mise de fonds de l’investisseur

Nous savons que le TGA est fréquemment considéré comme un taux pondéré composé à la fois du rendement sur la mise de fonds (ke) et de l’intérêt sur le prêt hypothécaire (kd). Le TGA peut donc être décomposé mathématiquement de la façon suivante :

 

TGA                =          (Kd x part relative)     +          (Ke x part relative)

 

En utilisant les données précédentes, on peut établir le rendement sur la mise de fonds à 17,2 %. L’investisseur profite donc de l’effet de levier engendré par l’emprunt de 150 000 $. Bien entendu, le placement est beaucoup plus risqué dans ce type d’exploitation que dans un CPG.  Par contre, le rendement potentiel est plus intéressant. Néanmoins, si l’exploitation s’avérait non rentable, les problèmes financiers reliés au remboursement de la dette seraient plus grands puisque l’exploitation ne générerait pas l’argent nécessaire au remboursement de la dette.

 

 

Conclusion

 

L’achat d’un immeuble à revenu en utilisant un taux d’actualisation des revenus nets après intérêt et amortissement de 5 % peut donc être un bon placement puisque le rendement sur le capital investi peut être alors de 17,2 %.  Il faut donc porter attention au type de taux de rendement dont on parle ainsi qu’au type de revenu auquel on l’applique.

 

 

 

Marco Fournier, ing.f., É.A. M.Sc.

Rédigé en février 2002

 



[1] Le lecteur intéressé à obtenir plus de détails sur l’arbre d’analyse des revenus d’un immeuble ou encore sur les démonstrations mathématiques peut consulter le site internet de la firme au www.cfmsinc.ca ou l’obtenir par fax en composant le 418-688-0431.

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